Olive Laporte - Photographies
À la question "qu'est-ce qu'une bonne photographie ?", on répondra selon son expérience et ses goûts, basés sur des critères à la fois intimes et culturels d'esthétique, d'harmonie, de force narrative ou d'évocation poétique. À la question "qu'est-ce qu'une bonne photographie de libellule ?", me voilà soudain un peu désemparé, ne sachant pas exactement ce que je cherche. Faut-il privilégier l'aspect documentaire, l'anecdote, rester sur des valeurs esthétiques ?
L'idéal est sûrement une combinaison de tout ça : avoir une belle image qui permette également une identification infaillible de l'animal. Mais soyons réalistes : avec une profondeur de champ de quelques millimètres et un insecte patrouilleur d'une instabilité chronique, on aura difficilement à la fois le net sur l'abdomen pour compter les segments, le net sur les yeux pour la beauté du portrait, des couleurs précises sur le thorax pour identifier la sous-espèce, un ptérostygma lisible au bout de chaque aile, un animal qui a le bon goût à cet instant précis de prendre une pose originale, et le tout de préférence sans contre-jour ni ombre portée. Enfin, si au second plan on pouvait avoir une vision globale de son biotope ce serait parfait, merci. Problème : en général l'instant est très fugace, et on ramasse surtout ce qu'on peut dans le temps qui nous est imparti.
Mais il y a aussi ces instants de grâce où l'insecte se pose en pleine lumière, dans un cadre limpide et accessible ; il est détendu, ne vous craint pas et vous laisse vous approcher, tourner autour de lui comme bon vous semble, tester différents réglages, différents angles, jouir pleinement du spectacle, en somme. C'est assez rare, mais ça existe.
C'est le cadeau que m'a fait ce jour-là cette somptueuse Aeschne mixte.